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Entretien croisé avec Françoise Roels, nouvellement nommée au conseil d’administration d’Inclusio, et Lionel Van Rillaer, CEO, réalisé par Francis Muyshondt

Françoise Roels vient de rejoindre le conseil d’administration d’Inclusio, une société immobilière réglementée (SIR) spécialisée dans le logement social. Forte de près de 20 ans d’expérience au sein de Cofinimmo, une autre société immobilière de premier plan, elle apporte un savoir-faire précieux en matière de gouvernance et d’investissements à impact social. Dans cet entretien, elle partage les raisons qui l’ont poussée à s’engager dans cette mission et ses attentes pour le marché du logement social. Lionel Van Rillaer, CEO d’Inclusio, complète cette discussion en nous éclairant sur les choix stratégiques récents de l’entreprise, qui visent à élargir son portefeuille et à maximiser son impact social.

Qu’est-ce qui vous a motivée à rejoindre le conseil d’administration d’Inclusio et quels sont vos objectifs principaux ?

Françoise Roels : J’ai été particulièrement attirée par la combinaison entre l’impact social d’Inclusio et la possibilité pour des investisseurs, qu’ils soient particuliers ou institutionnels, de participer à cette aventure humaine via une structure SIR. Le fait que nos investissements puissent directement améliorer les conditions de vie d’une population souvent vulnérable est une dimension essentielle pour moi. Je souhaite apporter mon expertise en gouvernance pour soutenir le management, veiller à ce que les meilleures décisions soient prises et que les objectifs d’Inclusio soient atteints. En somme, mon rôle est d’assurer une gouvernance de qualité, un défi à part entière, surtout en étant entourée de collaborateurs aussi compétents.

Vous avez passé près de vingt ans chez Cofinimmo. Travailler pour Inclusio, une structure plus modeste, n’est-il pas un recul pour vous ?

Françoise Roels : Absolument pas. L’essentiel ne réside pas dans la taille de l’entreprise, mais dans l’impact que l’on peut avoir. Mon choix de rejoindre Inclusio ne se limite pas au transfert de mes compétences techniques, mais bien à mon envie de contribuer à une mission. Inclusio, bien que petite en termes d’effectifs, affiche une agilité et un engagement exceptionnels. Les collaborateurs sont de véritables entrepreneurs, ce qui crée un environnement de travail dynamique et motivant.

Lionel, comment avez-vous vécu le début de l’aventure Inclusio et en quoi cela a-t-il différé de vos expériences passées ?

Lionel Van Rillaer : Au départ, j’étais un peu déstabilisé, ayant travaillé auparavant pour de grands groupes internationaux comme DEME, Jan De Nul et BESIX. Au lancement d’Inclusio, nous n’étions que deux, Xavier Mertens et moi. Bien que les projets soient de plus petite envergure, ils n’en étaient pas moins stimulants. La mentalité était également différente : là où les grandes entreprises privilégient avant tout le profit, Inclusio cherche à équilibrer impact social, durabilité et rentabilité économique. Dans une petite équipe, il faut aussi savoir être polyvalent ; je gérais même des tâches comme les mises à jour du site web et les envois postaux au début ! Aujourd’hui, bien que nous ayons pu déléguer davantage, cette flexibilité reste essentielle.

Françoise Roels rejoint Inclusio avec une solide expérience dans le secteur. Comment cela renforcera-t-il l’équipe dirigeante ?

Lionel Van Rillaer : Nous sommes ravis d’accueillir Françoise. Son expertise en matière de SIR est précieuse, notamment dans des domaines clés comme la gouvernance, la stratégie et la gestion de l’information. Elle a joué un rôle de premier plan chez Cofinimmo, pilotant des augmentations de capital et des initiatives stratégiques. Ce bagage renforce indéniablement notre conseil d’administration.

Inclusio a pris récemment des décisions stratégiques pour élargir son portefeuille tout en renforçant son impact social. Quels ont été les résultats ?

Lionel Van Rillaer : Au début, notre priorité était le logement locatif abordable. Mais progressivement, des demandes d’organisations du secteur des soins sont venues élargir notre mission. Nous avons donc aussi développé des projets pour les personnes en situation de handicap mental, avec un impact social conséquent. Plus récemment, des associations comme la Croix-Rouge, Fedasil et SamuSocial nous ont sollicités pour des bâtiments plus grands. Nous possédons aujourd’hui 13 logements collectifs, un développement que nous n’avions pas envisagé initialement.

La pénurie de logements sociaux est particulièrement aiguë à Bruxelles. Quels sont vos projets pour accélérer leur développement ?

Lionel Van Rillaer : La transformation de bureaux vacants à Bruxelles est une piste intéressante. Nous avons déjà reconverti deux bâtiments et un troisième projet est en cours. Ces conversions sont possibles car il reste encore beaucoup de bureaux inoccupés dans la capitale. Par ailleurs, le secteur politique bruxellois envisage de mettre des terrains à disposition des investisseurs privés comme Inclusio, pour y construire du logement social. Un partenariat public-privé pourrait être une solution viable, bien qu’il nécessite un consensus politique.

Les coûts de construction et les réglementations augmentent. Est-ce un obstacle pour Inclusio ?

Lionel Van Rillaer : Absolument. Les nouvelles réglementations pour garantir une qualité élevée des constructions entraînent une hausse des coûts. Par exemple, chaque année, de nouvelles exigences en matière d’urbanisme, d’accessibilité et de sécurité incendie s’ajoutent. Cette surenchère de qualité peut parfois être comparée à construire une « Rolls Royce » pour tout le monde, là où une Fiat serait suffisante pour satisfaire les besoins de base.

Françoise, vous partagez cette vision ?

Françoise Roels : Il est essentiel de trouver un équilibre entre qualité et quantité. La demande en logements est forte, mais les exigences liées au climat et à la sécurité peuvent rendre leur développement complexe et coûteux. L’analogie avec l’alimentation est parlante : nous voulons tous manger des aliments de qualité, mais il est parfois nécessaire de recourir à des solutions plus abordables pour nourrir le plus grand nombre.

Comment Inclusio se positionne-t-elle dans ce contexte de développement durable et d’engagement social ?

Françoise Roels : En tant que société à impact, Inclusio doit respecter les réglementations, bien sûr, mais il est tout aussi important de maintenir un dialogue ouvert avec les familles et les responsables politiques. Notre objectif est de contribuer à une histoire sociale plus large et de rester réactifs face aux défis futurs.

Le financement de projets reste un enjeu. Une augmentation de capital est-elle envisagée ?

Lionel Van Rillaer : Nous avons actuellement trois projets en cours qui nécessitent un investissement de 30 millions d’euros. Pour maintenir notre développement, nous devrons envisager une augmentation de capital à terme, tout en optimisant la rotation de notre portefeuille immobilier.

Françoise, pensez-vous influencer cette stratégie de financement ?

Françoise Roels : Les SIR doivent régulièrement recourir à des apports de capital pour assurer leur croissance tout en maîtrisant leur niveau d’endettement. Cette démarche collective entre direction et conseil d’administration est cruciale pour la pérennité de l’entreprise.

Quelles tendances observez-vous dans le secteur de la construction ?

Lionel Van Rillaer : La construction modulaire se développe rapidement, avec des éléments préfabriqués en usine pour garantir une meilleure qualité et des délais réduits. En Flandre, des projets de logement social modulaire sont en préparation, ce qui permettra une expertise accrue et, nous l’espérons, une baisse des coûts.

Avec votre expérience, Françoise, avez-vous des perspectives complémentaires sur ce sujet ?

Françoise Roels : La standardisation gagne du terrain, surtout dans les secteurs de soins et des bureaux. Cette approche réduit les risques et rend les projets plus fiables. Bien entendu, une intégration harmonieuse dans l’environnement reste essentielle pour le confort des occupants.

Comment répondez-vous aux spécificités régionales du marché du logement social en Belgique ?

Lionel Van Rillaer : En Flandre, l’accent est mis sur l’accession à la propriété, tandis qu’à Bruxelles et en Wallonie, les partenariats public-privé devraient jouer un rôle plus important. Nous explorons la possibilité de céder des bâtiments obsolètes à des acteurs privés sous bail à long terme, comme cela se fait déjà à Wachtebeke. Ces solutions innovantes pourraient répondre au manque de budget pour rénover ou construire de nouveaux logements sociaux.

Françoise Roels : Cette approche rappelle des initiatives comme le projet « Scholen van Morgen » en Flandre. Fournir un logement de qualité à des tarifs abordables est un défi essentiel, car le droit au logement est une pierre angulaire de notre société.

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